Sahara: Séminaire international sur l’autonomie et la préservation de l’identité linguistique et culturelle

Nations Unies (New York) – La Mission permanente du Maroc auprès de l’ONU à New York a organisé, mardi, un séminaire international de recherche sur le thème « Identité linguistique et culturelle dans les régions d’autonomie territoriale ».

Le séminaire a été animé par d’éminents experts, chercheurs et universitaires notamment de la Suisse, d’Espagne, de France et du Portugal. Il a connu la participation d’une cinquantaine de diplomates, dont plusieurs ambassadeurs à New York, de hauts responsables onusiens et des médias accrédités auprès des Nations Unies. Cette rencontre a permis de comparer l’Initiative d’autonomie proposée par le Royaume pour la région du Sahara avec d’autres expériences d’autonomie dans le monde, notamment en ce qui concerne la préservation de l’identité linguistique et culturelle des régions autonomes dans le cadre de statuts d’autonomie territoriale ou régionale sur plusieurs continents. Les experts internationaux ont eu l’occasion de partager les expériences du Pays basque espagnol, de l’île française de Corse, de la région administrative spéciale chinoise de Macao et du pays constitutif d’Aruba au sein des Pays-Bas. Modérant ce séminaire, M. Marc Finaud, Conseiller principal au Centre de politique de sécurité de Genève, a rappelé dans son intervention que le Maroc a lancé depuis 2009 une série de séminaires universitaires comparatifs internationaux sur plusieurs aspects de l’autonomie territoriale notamment l’autodétermination, les droits humains, la régionalisation, les modèles de développement, le rôle de la société civile, les relations extérieures, le règlement des différends politiques et l’attraction des investissements étrangers. Abordant le thème du séminaire, l’intervenant a souligné que l’Initiative du Maroc pour l’autonomie de la région du Sahara comprend plusieurs dispositions relatives à l’identité culturelle et linguistique, notamment l’article 5 qui stipule que les populations du Sahara disposeront des ressources financières nécessaires au développement de la région dans tous les domaines et participeront activement à la vie économique, sociale et culturelle de la nation. Il a en outre cité l’article 12 qui stipule que ces populations exerceront, à l’intérieur des limites territoriales de la région, des pouvoirs aussi dans le domaine des affaires culturelles, y compris la promotion du patrimoine culturel hassani du Sahara marocain. Pour sa part, Dr. Asier Aguirresarobe, chercheur postdoctoral en histoire à l’université du Pays basque (UPV-EHU) en Espagne, a relevé que plusieurs points de l’Initiative d’autonomie présentée par le Maroc en 2007 reflètent un engagement en faveur de la protection culturelle et linguistique de la spécificité de la région du Sahara. En ce qui concerne les attributions culturelles, l’Initiative marocaine reconnaît que les institutions autonomes du Sahara participeront à la vie culturelle plus large de la nation marocaine, a-t-elle noté en se référant à l’article 5 de l’Initiative d’autonomie, ajoutant que ??l’article 12 de cette même Initiative établit lui aussi la compétence des autorités régionales en matière d’éducation et d’affaires culturelles. Elle a fait observer que ces dispositions font écho à l’article 5 de la Constitution du Royaume de 2011, qui affirme que “l’État œuvre à la préservation de la Hassaniyya en tant que composante intégrante de l’unité culturelle marocaine, ainsi qu’à la protection de ses locuteurs et de l’expression culturelle concrète du Maroc”. De son côté, Vanessa Amaro, professeure associée au Centre d’études portugueses relevant de l’Université polytechnique de Macao, a indiqué que l’autonomie dans la région administrative spéciale chinoise de Macao et celle proposée par le Maroc pour les provinces du Sud envisagent une forme de gouvernance décentralisée qui préserve la souveraineté nationale tout en accordant aux autorités locales la capacité de gérer les affaires culturelles, sociales et éducatives. Elle a, de même, fait remarquer que l’initiative marocaine propose également que la population sahraouie exerce les pouvoirs législatifs, exécutifs et judiciaires dans la région, notamment en matière d’éducation, de promotion culturelle et de préservation du patrimoine. Abondant dans le même sens, Dr. Júlio Reis Jatobá, membre de la faculté des lettres relevant de l’université polytechnique de Macao, a souligné que les articles 5 et 12 de l’Initiative marocaine d’autonomie font spécifiquement référence à la protection du patrimoine culturel hassani saharien, y compris les traditions linguistiques telles que l’arabe hassani, ainsi qu’au développement d’institutions locales comme les centres de formation d’artisans, les musées et les festivals culturels. Relevant les similarités entre le pays constitutif d’Aruba au sein des Pays-Bas et la région du Sahara marocain, M. Marc Finaud, a noté, dans une autre intervention, que les deux régions “jouissent ou jouiront tous deux d’une large autonomie qui inclut le patrimoine culturel, les langues et l’éducation, mais exclut la politique étrangère et la défense”. En outre, tous les deux élisent leur Parlement et, indirectement, leur gouvernement qui promulgue les lois et les règlements, notamment sur l’éducation et la culture, a-t-il signalé, ajoutant que pour mettre en œuvre sa politique, notamment en matière d’éducation et de culture, la région autonome bénéficie de ses propres ressources, notamment fiscales et des recettes des ressources naturelles, mais peut également recevoir l’aide du gouvernement central (de l’Union européenne dans le cas d’Aruba). La professeur Dominique Verdoni, de l’Université de Corse Pasquale Paoli, a, quant à elle, livré une comparaison entre le degré d’autonomie en Corse et les dispositions qu’offre l’Initiative marocaine d’autonomie notamment en matière de préservation de l’identité linguistique et culturelle dans la région du Sahara. Partant du fait que l’Initiative marocaine permet aux populations du Sahara de gérer leurs affaires de manière démocratique par le biais d’organes législatifs, exécutifs et judiciaires jouissant de pouvoirs exclusifs et disposeront de ressources financières nécessaires au développement de la région dans tous les domaines et participeront activement à la vie économique, sociale et culturelle de la nation, Mme Verdoni a indiqué que dans le cas de la Corse, il s’agit plutôt d’un “pouvoir d’adaptation” où l’on ne dispose pas d’un pouvoir législatif dans le sens propre du terme. “Il n’y a pas de possibilité de voter les lois”, a-t-elle dit, expliquant que c’est l’Assemblée nationale qui vote les lois et l’Assemblée de la Corse a le droit d’évaluer l’adaptation de ces textes à sa réalité ou de demander leur révision et modification. Pour elle, ce processus est long et compliqué, qui jusqu’à présent, n’a pas donné des résultats. Dans le cas de l’Initiative marocaine d’autonomie qui prévoit des pouvoirs législatifs aux populations du Sahara, “c’est beaucoup plus opérationnel”, a-t-elle relevé. Commentant la disposition de l’Initiative d’autonomie marocaine qui permet aux populations de la région du Sahara d’exercer des pouvoirs notamment dans les domaines de l’éducation et des affaires culturelles, y compris la promotion du patrimoine culturel hassani du Sahara, Mme Verdoni a évoqué une prise de conscience de l’existence de différences culturelles et linguistiques et une reconnaissance que ces situations vont permettre un enrichissement des compétences des citoyens et qu’il ne s’agit nullement d’un processus de substitution ou d’un monolinguisme. Elle a, par ailleurs, relevé qu’à l’instar au Sahara marocain où la préservation du patrimoine culturel de la région est soutenue matériellement et financièrement par le gouvernement central, la Corse bénéficie aussi de financement et est soutenue par des moyens de dotation de ressources humaines, soulignant toutefois la nécessité de se fixer des objectifs de planification linguistique. Ce séminaire international a permis de souligner l’importance de l’Initiative marocaine pour la négociation d’un statut d’autonomie pour la région du Sahara, sous l’angle des efforts consentis par le Maroc en matière de préservation de l’identité culturelle et linguistique régionale au niveau national et aux compétences du gouvernement régional en matière d’éducation, de préservation de la langue et de la culture régionales et sa relation avec le gouvernement central sur ces domaines.