Rabat en droit de reconsidérer sa coopération sécuritaire féconde avec Madrid

Drôle de logique que celle qui structure la position de l’Espagne à l’égard du Maroc, pays qui a tant donné pour recevoir en échange un coup de poignard dans le dos. Avec son jeu trouble, Madrid n’a laissé d’autre choix au Maroc que de reconsidérer sa coopération sécuritaire féconde. Basta ! S’il est vrai que le Royaume n’a jamais usé de la carte sécuritaire dans ses rapports avec l’Espagne, la duplicité éhontée du voisin du nord est d’une insolence telle que tous les moyens sont désormais permis pour défendre les intérêts suprêmes du pays. A commencer par cet « acte humanitaire » dont se gargarise l’Espagne pour faire introduire sur son territoire un repris de justice et un criminel de guerre sous une fausse identité et avec un faux document. Se croyant assez futée pour tromper tout le monde, Madrid a fini par se donner en spectacle après s’être fourrée dans un bourbier aux multiples dimensions. D’abord vis-à-vis de son propre système judiciaire qu’elle a tenté d’instrumentaliser pour soustraire le malfrat notoire aux poursuites engagées contre lui. A l’égard de l’Union européenne ensuite dont les lois interdisent l’accès à un énergumène de cet acabit. Et vis-à-vis du Maroc, son partenaire exemplaire, dont la coopération sécuritaire a été sans faille. Dans le cas d’espèce, l’insolence devient d’autant plus insoutenable que le chef des séparatistes, introduit en catimini sur le territoire ibérique, est sous le coup de poursuites pour génocide et terrorisme, entre autres. Or, les relations entre les deux pays, longtemps qualifiées d’excellentes et de stratégiques, ont été confortées davantage à la faveur d’une coopération féconde en matière de lutte contre le terrorisme. Un des crimes et pas des moindres pour lesquels le dénommé Brahim Ghali est poursuivi. Au cas où le voisin du nord aurait-il la mémoire courte, il suffit de lui rappeler l’engagement infaillible des services marocains de sécurité et leur contribution inestimable au démantèlement de dizaines de cellules terroristes qui opèrent sur son territoire. On n’insistera jamais assez sur la collaboration féconde de la partie marocaine avec les autorités espagnoles dans le cadre de l’enquête sur l’attentat de Madrid (11 mars 2004), qui a fait plus de 200 morts et 1900 blessés à la suite de l’explosion de bombes dans les cercanias (trains de banlieue) à la gare de Madrid. Ou faut-il rappeler l’apport de la partie marocaine aux enquêtes sur les attentats des 17 et 18 août 2017 en Catalogne perpétrés par l’hydre terroriste dite « État islamique » par des véhicules-béliers sur La Rambla à Barcelone et à Cambrils, ayant fait 70 tués? Toujours tout aussi efficaces, les services de renseignement marocains ont coopéré avec professionnalisme et discrétion à la lutte contre la traite des êtres humains, le trafic de drogue et les nouvelles manifestations de la criminalité transnationale organisée. En janvier dernier encore, l’agence européenne de gardes-frontières et de garde-côtes, Frontex, soulignait que les flux migratoires via le détroit de Gibraltar ont accusé un recul de 58% après deux années records en 2017 et 2018, une performance attribuée à la bonne coopération entre Rabat et Madrid en matière de lutte contre l’immigration irrégulière. Au total, 139.000 candidats à l’immigration irrégulière ont foulé le sol européen en 2019, en recul de 6% en comparaison avec 2018, le chiffre le plus bas depuis 2013. En Espagne, 24.000 migrants ont essayé de rejoindre les côtes andalouses durant l’exercice précédent contre 64.000 en 2018. L’apport du Maroc était si primordial à ce fléchissement que les mafias des réseaux migratoires ont redirigé leur activité vers l’Europe orientale, porte d’entrée la plus convoitée l’année dernière par les migrants irréguliers, ou encore vers les Iles Canaries. C’est à se demander par quelle myopie stratégique ou tropisme congénital le voisin ibérique a-t-il perdu le Nord au point de sacrifier un partenariat de cette nature patiemment bâti et longtemps entretenu ? On savait que l’Espagne, une partie du moins, est irrémédiablement attachée à une vision franquiste nostalgique d’un passé colonial qui, tel un démon, surgit à chaque différend avec le Maroc, dont elle conteste la souveraineté sur ses provinces du Sud. Mais de là à remuer ciel et terre pour essayer d’infléchir par tous les moyens déloyaux la reconnaissance américaine de la souveraineté pleine et entière du Royaume sur son Sahara, il n’y a qu’un pas que Madrid a allègrement franchi à ses risques et périls. De gaffes en bévues, de couleuvres en boas, l’Espagne s’est empêtrée avec l’épisode de l’ »acte humanitaire » dans un sérieux pétrin dont nul ne connait l’abîme et encore moins les conséquences. A moins de revoir sa vision donquichottesque et de comprendre les nouveaux enjeux qui s’opèrent à son flanc sud, y compris sécuritaires, Madrid continuera pour longtemps à naviguer à vue. Dans l’entretemps, pour le Maroc, toutes les options restent ouvertes. Désormais les coudées franches, Rabat est dans une position qui lui permet d’agir en fonction de la justesse de sa cause. La perfidie de l’Espagne, sa duplicité, sa désinvolture et sa mauvaise foi exigent une remise à plat totale des rapports. Basta !