Histoire du conflit du Sahara

Le 6 Novembre 1975, l’un des évènements les plus frappants de la deuxième moitié du XXème siècle est lancé à l’initiative de feu Sa Majesté Le Roi Hassan II: La Marche verte

Marche verteArmés de corans et de drapeaux du Maroc, 350 000 marcheurs reprennent possession pacifiquement du Sahara, sans rencontrer de résistance de la part des Espagnols. Le Royaume du Maroc, fort de la décision de la Cour Internationale de justice de la Haye, vient de parachever son intégrité territoriale. Ce qui devait être une simple formalité, les espagnols laissant la place aux marocains, se transforme alors au fil des années en une véritable partie d’échecs. Le Maroc, fort de documents historiques incontestables, de liens d’allégeances des tribus du Sud envers les différents souverains marocains, refusera de se plier aux multiples tentatives de déstabilisation de l’Algérie, qui. en soutenant le Front Polisario, tente par tous les moyens de percer vers l’Atlantique, ouvrant ainsi la route de l’Amérique à ses sous-sols, riches en minerais et en hydrocarbures.

Car la clé du dossier est bel et bien l’ouverture d’un couloir vers l’Atlantique pour l’Algérie

En effet, le port d’Alger est loin du sud de l’Algérie, et il est donc difficile de transporter le fer, l’or, ou le gaz sur plus de 1600 kilomètres. Il serait plus simple pour l’Algérie de « percer » à l’ouest, s’appuyant sur un micro état qu’elle ferait subsister. Ce projet n’est pas nouveau, il date d’avant la décolonisation, puisque la France proposera à l’Espagne, qui administre alors le Sahara, la création d’un port à … Tarfaya, afin de pouvoir évacuer les minerais issus d’une des plus grandes mines de fer à ciel ouvert du monde, dans le sud-ouest Algérien. Le Maroc, fidèle à son histoire, refusera de négocier avec les français et les espagnols, tant que l’Algérie ne serait pas souveraine.Marche verte
Le Maroc fera montre, à cet égard, d’une solidarité maghrébine exemplaire, estimant que la lutte du peuple algérien frère était également la sienne, soutenant les combattants du FLN, leur apportant soutien logistique et matériel. Mais les intérêts particuliers algériens auront raison de cette solidarité.

Poursuivant une stratégie de soutien inconditionnel au front Polisario, L’Algérie épuisera plusieurs secrétaires généraux de l’ONU, fera dépenser à l’organisation près de 600 millions de dollars, et ce, dans le seul but d’asseoir une stratégie de puissance régionale dictée par la richesse de son sous-sol.

Malgré cette campagne algérienne, les soutiens ne cessent de s’amenuiser, la très grande majorité des pays péférant se ranger du côté de la légalité internationale en retirant ou gelant leur reconnaissance à la RASD.

Face à ce que Feu Sa Majesté Le Roi Hassan II estimait être « L’escroquerie du Siècle », le Maroc, serein et pragamatique, a  décidé , en concertation avec les principaux concernés – c’est à dire les populations du sud du Royaume-, de lancer des consultations en vue de proposer un plan d’autonomie qui respecte tous les standards internationaux en matière de gestion décentralisée. Respect des identités, libération des initiatives, prise en main de leur destin, les sahrawis profiteront de cette solution juste et équilibrée, qui leur permettra, enfin, de connaître la quiétude à laquelle ils ont droit.

{mospagebreak}En effet, La vocation saharienne du Maroc est profondément prouvée grâce aux indéfectibles liens ethniques, culturels et religieux qui unissaient les populations du Nord et du Sud depuis la conquête musulmane, mais c’est à partir du Xlème siècle que le Sahara a joué un rôle décisif dans l’histoire du Maroc, en lui donnant une originalité propre au Maghreb, et un rôle de trait d’union entre l’Europe méditerranéenne et l’Afrique Noire. Les facteurs économiques ont entraîné une double attraction, les nomades étant attirés par les riches terres du Nord, et des dynasties inversement imprégnées de la nécessité de maîtriser le trafic caravanier transaharien. De cette double attraction, renforcée par le sentiment religieux, résultat le fait que plusieurs dynasties régnantes émanèrent du Sahara.
Dans le fonctionnement des structures de l’Etat Marocain séculaire, le Sahara a toujours occupé une place privilégiée, et souvent déterminante. Ainsi, les fondateurs des dynasties au Maroc étaient souvent directement issus de l’une des tribus du Sahara. C’est notamment, le cas des Almoravides dont le fondateur, Youssef Ben Tachfine (Xlème siècle), devait constituer le «Grand Maroc» qui s’étendait jusqu’aux frontières du Sénégal. Ces liens étroits avec le Sahara se sont renforcés avec l’avènement au pouvoir de la Dynastie Alaouite (XVIIème siècle), originaire du Tafilalet (Sahara), et qui n’a cessé de conforter l’unité nationale et de renforcer les liens immémoriaux entre toutes les régions du Maroc.
Les Sultans Alaouites ont toujours eu des liens de parenté par alliance avec les grandes familles sahraouies. La mère du Sultan Moulay Rachid était d’origine sahraouie.
C’est à son frère et successeur Moulay Ismail que revient le mérite d’avoir fondé une unité nationale répondant à une conception spécifique de l’Etat Marocain. En 1678 Moulay Ismail, qui a déjà imposé son pouvoir sur la majeure partie du Maroc du Sahara à l’atlantique et obtint l’appui de groupements capables d’appuyer d’une façon permanente la dynastie. Pour cela il accomplit un périple qui l’a conduit au Sahara dont les tribus lui firent un serment d’allégeance. La tribu des Mghefra un des principaux groupements dont les terres de parcours s’étendent de l’Oued Noun au Cap Bojador était conduite par le Cheikh Bekkar. L’objectif du souverain était atteint mais il fallait encore un gage affectif symbolisant l’alliance renouvelée du Sultan avec les arabes du Sahara par un mariage. En effet, le Cheikh des Mghafra donna sa fille Lalla Khenata à My Ismail, cette dernière est aussi la mère de Sultan My Abdelleh, 9ême grand père en ligne directe de Sa Majesté Mohammed VI.
La politique saharienne des Sultans du Maroc était adaptée à leurs moyens et aux modalités d’exercice du pouvoir, et visait à assurer la domination chérifienne en s’appuyant à la fois sur le prestige et le rayonnement religieux des marabouts et sur l’ardeur guerrière et religieuse des tribus nomades, alimentées en armes. Ainsi, toutes les énergies populaires se rassemblaient sous l’autorité du Sultan dans la lutte contre l’envahisseur étranger.
Pour faire face à l’occupation étrangère, des résistances se manifestèrent sur l’ensemble du territoire sahraoui. Deux expéditions du Sultan étaient effectuées dans la région méridionale du Souss en 1882 et 1886 tandis que les attaques et les raids des tribus locales se succédaient à partir de 1885, contraignant les espagnols à s’enfermer dans les fortins adossés à la mer et dans l’impossibilité matérielle d’exercer un contrôle du territoire. Cette résistance atteignit son apogée avec l’action du Cheikh Ma El Ainin qui agissait comme représentant personnel du Sultan pour l’ensemble du Sahara, et devint à partir de1890, le chef de la résistance locale à la pénétration espagnole puis française dans l’Ouest saharien.{mospagebreak} Les populations du Sahara marocain:
Les populations vivant dans le Sahara marocain sont variées et diverses; leur sédimentation s’effectue par la religion et la marocanité.
Historiquement, politiquement, linguistiquement, culturellement, ethniquement et racialement il n’existe pas de «peuple sahraoui ». En revanche, l’immense désert du Sahara, partagé entre le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, la Libye, le Tchad, le Niger, le Mali, et la Mauritanie, a toujours été occupé par des populations parfaitement identifiées et irréductibles les unes aux autres. Les populations sahariennes ont été rattachées plus ou moins arbitrairement en même temps que leurs zones de normalisation. Seul le Maroc et ce, depuis le Xlème siècle, avait unifié les fractions de ces populations vivant dans la partie du Sahara qui était sous sa souveraineté.
Plus encore, la plupart des tribus du Sahara marocain ont elles-mêmes des attaches avec le reste du Maroc et leurs ancêtres ou fondateurs sont venus de l’intérieur de pays. Ce furent en général des marabouts (saints) illustres comme Sidi Ahmed Rguibi, neveu de Moulay Abdelslam Ben M’chich, le grand marabout des débuts de l’Hégire, dont le tombeau se trouve près de Tétouan ou Sidi Ahmed Laroussi, originaire de Marrakech et fondateur des Larroussiyine.
Les populations du Sahara marocain sont divisées en une vingtaine de tribus bien individualisées qu’il est possible de regrouper en deux grandes confédérations, celle des Rguibat et celle des Teknas.
Les descendants de Ahmed Rguibi venant de Touat se sont installés vers 1503 dans la vallée du Draâ où il fonde une zaouia qui va bientôt s’étendre à toute la Saquia el Hamra.
Au début du XVIIIème siècle, le Sultan Alaouite Moulay Ahmed Dehbi confirme aux Rguibat la possession de la Saquia El Hamra et, à partir de ce moment là, ils commencent un lent mouvement d’expansion vers l’océan.Un brassage s’opéra rapidement entre les diverses populations locales. C’est ainsi qu’Ahmad Rguibi épousa une Arabe dont il eut deux fils qui donnèrent chacun naissance à un clan: Ah aux Rguibat Sahel et Kacem aux Rguibat Igouacem ou Charg. D’une épouse noire il eut un autre fils, Amer qui est l’ancêtre des Rguibat Ouled Cheikh et Ouled Taleb.
Le second grand groupe de tribus vivant dans le Sahara marocain est constitué des Teknas, Berbères sahariens à l’origine mais dônt certaines tribus furent arabisées à partir du Xlème siècle. Le centre politique des Teknas est l’oasis de Goulimine et ils sont composés de douze tribus dont les origines berbères ou arabes sont parfaitement connues. Parmi elles, plusieurs ont des origines clairement fondées dans le Maroc septentrional. Ainsi les Izarguiyine venus de la région comprise entre Sidi Ifni et Tarfaya; les Laroussiyine qui sont originaires de Marrakech; les Ouled Dhim, tribu arabe hymyarite qui a commencé par se fixer dans la région d’Essaouira et de Meknès avant de venir s’établir plus au sud et dont une partie réside encore dans le Maroc septentrional; les Ouled Tidrarine qui ont pour fondateur Sidi Ahmed ben Ghandour né à Ouezzane au nord de Fès ; les Filali enfin viennent du Tafilalet.{mospagebreak}Toutes ces tribus n’ont jamais constituées un peuple dont on a vainement cherché son existence dans l’histoire. Un peuple, c’est une réalité bien trop massive pour qu’on puisse la cacher dans sa manche. Il se remarque, il se distingue des autres peuples par l’espace occupé, ou par sa langue, ou son passé, ou ses institutions, ou son niveau de développement, par le poids dont il pèsequelque fois sur autrui. Quand avant 1912, un marchand ou une caravanier voyageaient du Nord du Maroc vers le Sud, ils n’avaient de frontière à traverser, nul passeport à produire, pas de douane à payer, pas de monnaie enfin à échanger. Alors, ou donc était dissimulé ce peuple sahraoui, où étaient ses frontières son repaire. Quoique fort bien placés pour avoir longuement occupé la région, les espagnols eux-mêmes ne l’ont pas découvert. Car autrement, pourquoi n’auraient ils pas argué de l’existence dudit peuple sahraouis, seul vrai maître du pays lorsque naguère, ils contestaient le droit des marocains? Mais non, leur unique argument fut de dire qu’avant leur arrivée, eux espagnols, le Sahara était «Terra Nullus», autrement dit terre de personne. Les espagnols, il y a, soixante quinze ans se sont adressés en 1900, au Sultan pour tenter d’obtenir qu’il leur cédât la Saquia El Hamra. Ils se sont adressés au Sultan, et non pas àje ne sais quel peuple sahraoui censé faire aujourd’hui, valoir des titres ancestraux sur Saquia El Hamara.
Qu’ils soient Rguibats Sahel, Ouled Dlim ou Teknas, Reguibats Lgouacem, Atattasou Kountas ou Chambas, les sahraouis sont tous des musulmans sunnites de rite malekite, le Sultan Amir E! Mouminin, Sidna, est leur fédérateur. Ils le voient à cheval sous un parasol signe de proximité avec Dieu. Les Khotbas du vendredi et à l’occasion des fêtes religieuses après les implorations de Dieu et la prière et le salut dû à Sidna Mohammed. Les fidèles au Sahara prononçaient cette prière « que Dieu glorifie Sultan et pacifie E! Watan ». Aujourd’hui devise sacrée « Dieu, la Patrie, le Roi ».
Les zaouias, ou centres de renouveau islamique se multipliaient dans le Sahara marocain au XVIème siècle et ils naissent dans une ambiance de guerre sainte et d’identité religieuse. La plus importante est la zaouia Maa El Ainin à Smara. Cette zaouia a été fondée par le Chérif Ma El Aïnin de Chenguet les Sultans Moulay El Hassan et Moulay Abdelaâziz avaient pour lui le plus grand respect et le renvoyaient chargé de présents à chacune de ses visites à la cour. Un courant de pensée soufiste a régné au Sahara et qui s’est propagé jusqu’auNord tel qu’il est rapporté dans l’encyclopédie coloniale et maritime l’Algérie et le Sahara «on trouve ceux-ci (les Soufistes) dans presque toute la campagne algérienne. La plupart se prétendent d’origine chérifienne et déclarant venir d’un pays fabuleux du sud marocain appelé Sakiet cl Hamra » le ruisseau rouge.{mospagebreak}Entre 1795 et 1842 sous le règne des Sultans Moulay Slimane et Moulay Abderrahmane, en raison des iniquités de certaines exactions et de mauvais procédés envers les pauvres gens commis par des agents du Makhzen, le pouvoir central sûr de l’adhésion des populations et de leur attachement à l’intégrité territoriale décide d’accorder l’autonomie à certaines régions lointaines. Cependant l’octroi de l’autonomie ne signifie pas abandon des habitants à leur sort. Une correspondance régulière est échangée entre le Sultan et les gens de ces régions ; celui-ci intervient dans les différends entre les tribus, et lorsque commencent à se préciser les menaces européennes, le Sultan recommande aux habitants d’être « comme une seule main contre les entreprises du dehors », et de s’abstenir de commercer avec les étrangers. Ces menaces ont, par contre coup, resserré les liens entre le Makhzen et les provinces sahariennes. A chaque intervention, les habitants envoient des députations auprès du Souverain pour exprimer leurs doléances et obtenir des renforts. Le Sultan tout en calmant les habitants, ne manque pas de protester contre ces interventions, de demander des explications et d’affirmer sa souveraineté sur ces territoires. Cette souveraineté, pourtant irréfutablement établie, les puissances coloniales la contestent. Pour camoufler leurs visées, elles prétendent que le Sahara est une région inoccupée, inorganisée et ne relevant de personne. En fait l’intérêt que-l’Europe et particulièrement la France et l’Espagne portent au Sahara est multiple.
Pour la conquête du Sahara, la France jouit de conditions particulièrement favorables. La délimitation de la frontière telle qu’elle a été arrachée par le traité de Lalla Marhnia (mai 1845) est incomplète. Pour justifier son intervention à Ifhi, l’Espagne invoque ses traités avec le Maroc, particulièrement le traité de 1767 concédant aux Espagnols «depuis Santa Cruz jusqu’au Nord… le droit exclusif de pêche » et l’article 8 du traité de 1860. Malgré les efforts du Sultan de racheter la concession, et malgré l’échec des deux commissions mixtes maroco-espagnoles chargées en 1878 et 1883 de reconnaître l’emplacement de Santa Cruz, l’Espagne continue à réclamer «la rade Ifni entre l’Oued Noun et Agadir» et fait admettre son point de vue à la France dans l’accord franco-espagnol de 1904.
Après l’échec diplomatique du Marne, et bien que la conférence de Madrid réunie du 19 mai au 3 juillet 1880 garantisse l’intégrité du territoire marocain, c’est à une véritable mutilation de celui-ci que vont s’atteler les puissances coloniales en s’attaquant d’abord aux provinces sahariennes.
Pour asseoir leur autorité et l’exercice de la souveraineté sur les territoires sahariens, les Sultans se déplaçaient eux-mêmes dans les territoires du Sahara comme en témoignent, par exemple, les expéditions effectuées en particulier par les Sultans Moulay Ismail et Hassan I, en vue de contrecarrer les visées étrangères sur le Sahara.
La mort du Sultan Moulay Hassan a produit une extraordinaire émotion dans toutes les chancelleries de l’Europe. Le journal la République Française écrivait dans son édition du 13 juin 1894 «la disparition de nul autre souverain du monde civilisé n’eût causé assurément un effet comparable à celle de ce Chérif marocain, chef politique et religieux d’un empire sur fondations ruinées, mais qui détient à l’occident les clefs de la méditerranée. ». Dans le journal Semaphone de Marseille du 12 juin 1894 son correspondant écrivait «une nouvelle qui a causé la plus vive surprise est celle de la mort du Sultan du Maroc Moulay Hassan avant d’ajouter que ce malheureux événement a crée un Etat politique au Sahara Occidental convoitée par l’Angleterre car il existe aux environ du Cap Bojador et au Cap Juby des comptoirs anglais. ». Dans le mêmearticle, on peut lire également que ce grand Sultan a maintenu énergiquement sa domination à l’intérieur et au Sahara et a failli même contourner les possessions françaises en Algérie ». C’est certainement ces craintes européennes de convulsion sociale et de crise politique précipités à l’occasion de la disparition de se grand Souverain, qui ont accélérés le processus de colonisation de l’ensemble du Maroc au Nord et au Sud.{mospagebreak}En dépit du partage du Maroc, à partir de 1912, en trois zones (française, espagnole et internationale), le protectorat n’avait pas effacé les liens unissant les populations de ces régions avec la monarchie marocaine qui ne cessera pas d’incarner l’union nationale et la volonté de se libérer de l’occupation étrangère. A ce sujet, il est important de rappeler l’hostilité de la résistance des populations marocaines, en particulier au Sahara qui avaient empêchés les autorités du protectorat espagnol d’exercer une souveraineté effective sur l’ensemble du territoire saharien, et ce jusqu’en 1934-36. Du reste, l’Espagne n’avait pu étendre sa présence dans l’hinterland qu’à la faveur de la conquête de la France, en 1934, de la ville marocaine de Tindouf et la jonction entre troupes françaises d’Afrique du Nord et de Mauritanie; ce qui avait permis de briser alors la résistance des populations sahraouis.
Néanmoins, ces marques de résistance continueront à ce manifester épisodiquement, notamment lors de la déposition par la France du Sultan Mohammed V, en août 1953, et au moment de la proclamation de l’indépendance du Maroc en 1955-1956. Elle reprendra sous une autre forme organisée et massive à partir de 1957. Et il avait fallu une mobilisation des armées française et espagnole, dans le cadre de l’opération dite « Ecouvillon », pour défaire cette résistance et permettre à l’Espagne de continuer à occuper le Sahara.
L’exercice de la souveraineté marocaine sur le Sahara se manifestait également à plusieurs niveaux, aussi bien en ce qui concerne la nomination de responsables locaux (nominations de cadis, de caïds et gouverneurs responsables) de la définition de leurs missions, la levée d’impôts ou de tributs, l’allégeance au Sultan des chefs de tribus, la mobilisation des populations à l’appel du Sultan pour lutter contre la pénétration étrangère.
De son côté, l’Espagne avait au moins jusqu’en 1956, tenu compte des liens du Sahara avec le reste du Maroc en faisant relever ce territoire de l’autorité civile et religieuse du khalife du Sultan dans la zone Nord que la convention franco-espagnole du 27 novembre 1912, instituant le sous- protectorat espagnol sur le Maroc, avait instauré dans la zone d’influence espagnole l’exercice de cette autorité khalifienne est attesté par de multiples actes que le Maroc avait en son temps, présenté devant les instances internationales.
Dès lors que le Maroc accéda à l’indépendance, en 1956, sur une partie de son territoire, il n’a cessé de revendiquer le droit de parachever son intégrité territoriale. Ainsi en ce qui concerne le Sahara, la demande marocaine de rétrocession de ce territoire par l’Espagne a été permanente depuis 1956.

Parmi les manifestations de la volonté marocaine de récupérer le Sahara dès l’aube de l’indépendance, on pourra rappeler l’important discours prononcé par feu Mohammed V le 25 Février 1958 à Mhamid Elghazlan : «Nous proclamons solennellement que nous poursuivrons notre action pour le retour de notre Sahara, dans le cadre du respect de nos droits historiques et conformément la volonté de ses habitants. Ainsi nous accomplirons la mission que nous nous sommes engagé à remplir, et qui consiste à restaurer notre passé et à édifier un avenir prospère qui permettra à tous nos sujets de connaître le bonheur et la tranquillité ». Cette revendication a été reprise et amplifiée par Feu Hassan II qui, déjà en septembre 1961, avait réaffirmé devant la conférence au sommet des non-alignés, les droits du Maroc sur le Sahara. Par ailleurs au moment de son adhésion à la charte de l’OUA, en 1963, le Maroc avait émis une réserve à propos de son intégrité territoriale et affirmé son droit de parachever celle-ci. Après avoir récupérer Tarfaya en 1958 et après avoir vainement chercher à régler le contentieux territorial sur Ifni et le Sahara, le Maroc avait été conduit à soumettre ces questions aux Nations-Unies qui, déjà à l’époque avaient commencé à mettre en place une politique et des règles de décolonisation. Fort de ses titres sur les portions de territoire encore sous domination espagnole, le Maroc allait requérir le bénéfice de ce droit à la décolonisation et l’application des règles et procédures de ce droit. La marche verte fut incontestablement un acte politique ayant sa place dans un processus en cours depuis de longues années dans l’enceinte des Nations Unies.{mospagebreak}

Allégeance synonyme de souveraineté:

L’Etat marocain se distinguait avant l’occupation par certains traits spécifiques qui se rapportaient à l’exercice de la souveraineté dans ce vaste empire chérifien. Il en est ainsi du système de décentralisation qui caractérisait les rapports entre le pouvoir central et les pouvoirs locaux; l’unité nationale étant cimentée par la personne du Sultan auquel toutes les populations sont liées par l’acte d’allégeance perpétuelle (« Beyâ») et, en contrepartie, le Sultan est tenu de respecter un certain nombre d’obligations, dont notamment la défense de l’intégrité territoriale du pays, la conduite des relations internationales, la protection des citoyens et des groupes ainsi que le respect des préceptes du Coran et de la Souna.

La spécificité traditionaliste du système constitutionnel marocain réside dans la double qualité du roi commandeur des croyants et chef de l’Etat et accrédite la conviction des habitants du pays d’appartenir à une entité commune. De haut en bas de la société, il constitue un référentiel qui fait de sa personne le père de la communauté et le gardien d’un territoire. De ce fait, il n y a pas de distinction entre allégeance et souveraineté. La littérature de la cour magnifie cette osmose entre le prince juste et éclairé et son bon peuple « cette foule faisant cercle autour du Sultan ressemblait à une bague ornant un doigt » proclame avec emphase l’historiographe Azziani. Le roi représentant l’autorité suprême sur le plan spirituel et politique a entre autres, la charge de la défense des populations et assume les relations avec les puissances étrangères.

Ce mode de fonctionnent existe depuis la création de l’Etat marocain et constitue encore son fondement. Il s’agit d’un mode qui a permis au Maroc de jouir d’une remarquable stabilité politique et d’adapter son autorité aux populations et aux espaces. Il s’agit bien de l’exercice de la souveraineté distincte certes de la pratique européenne en vigueur aux mêmes périodes. La CLI dans son avis consultatif du 16 octobre 1975 sur le « Sahara occidental », a reconnu cette spécificité sans toutefois en tirer toutes les conséquences juridiques puisqu’elle a tenu à distinguer allégeance et souveraineté, à l’image du droit européen classique. Pourtant, les juges Ammoun et Forster avaient attiré l’attention de la Cour sur les liens indissociables entre allégeance au Sultan, allégeance à l’Etat et souveraineté.

Les juges de la Haye ont conclu, à l’absence du Sultan, comme souverain de la région, tout en reconnaissant que les tribus qui y habitent faisaient, quant à elles, allégeance à ce Sultan précisément comme si l’on pouvait définir le maître sans sujets ou les sujets sans maître. Ce qui était hors de la conception des juges de la Haye, c’est que le Sultan disposait dans le Maroc entier, et donc au Sahara, du concours dévoué de personnages, figures saillantes auréolées de sainteté, dont l’influence auprès des gens, pesait plus que des bataillons. Ce qu’ils ne savaient pas, c’est que l’allégeance résultait du besoin que les tribus elles-mêmes avaient de l’autorité du Sultan, pour régler leurs litiges notamment, et que l’absence ou la carence de cette autorité s’exerçant à sa mode, aurait privé de son objet l’allégeance constatée. Les juges de la Haye ne savaient pas non plus que les tribus du Sahara bénéficiaient au premier chef du trafic marocain qui empruntait leur territoire et que, s’empressant donc, à la demande du Sultan, d’assurer la police des chemins, elles étaient par là même, un rouage de l’Etat marocain.Néanmoins, cet arrêt de la Haye a un double mérite: il reconnaît sans nulle ambiguïté le fait de l’allégeance, rendant absurde ipso facto, l’article où est niée la souveraineté.{mospagebreak}

Au niveau externe
D’éminents historiens, géographes et voyageurs avaient toujours considéré le Maroc et son Sahara, trait d’union entre le continent européen et l’Afrique, comme un berceau de civilisation Arabo-Amazigh qui a permis, grâce aux prolongement de ses racines nourricières en terre d’Afrique et son feuillage au Nord, la transmission de part et d’autre des cultures du savoir et des échanges commerciaux. Le professeur Théodore MONOD, directeur de l’institut français de l’Afrique Noire au début du siècle dernier, avait décrit cette position privilégiée en ces termes : « que l’on consulte dans l’Atlas africanus ou le vôlkerkunde von Africa, la liste des éléments culturels ayant, du Nord, atteint l’Afrique Noire et l’on saura combien il serait inexact de regarder le Sahara comme un gigantesque no man ‘s land séparant deux mondes totalement étrangers.».
La souveraineté marocaine sur le Sahara occidental a été consacrée par des dispositions expresses de multiples conventions passées par l’Empire Chérifien avec des Etats étrangers.
Si l’on se reporte aux documents publiés à l’époque par Paris sous le titre des «Affaires marocaines ». On verra les doléances des officiers dont les colonnes, venant du Sénégal et du Niger, se heurtaient dans l’Adrar ou ailleurs, à des tribus dont les caïds étaient nommés par le Sultan. J’ai bien dit «doléances », car la France, selon son intérêt, contestait les droits du Sultan. Mais les tribus, qui suivaient ses caïds, elles, ne les contestaient pas.
a) Les conventions Internationales signées par le Maroc et contenant des dispositions sur la délivrance et la protection de marins, faisant naufrage sur les côtes de l’Oued Noun, montraient que le Sultan avait autorité sur les habitants des côtes de l’Oued Noun et au-delà, et que les pays européens signataires le reconnaissaient. Ces différents traités signés avec l’Espagne, les Etats-Unis et la Grande Bretagne tout au long des XVIIIème et XIXème siècle demandaient au Sultan d’assurer la protection et l’assistance de leurs ressortissants pêchant ou faisant naufrage sur les côtes de l’Oeud Noun et au-delà, et d’intervenir pour leur libération. Le Maroc pouvait en conclure que la souveraineté marocaine sur le Sahara Occidental était confortée par un faisceau d’accords de volonté internationale émanant de nombreux pays, y compris l’Espagne.
b) La convention Anglo-Marocaine du 13 Mars 1895 reconnaissait expressément la souveraineté marocaine sur toutes les terres allant de l’Oued Draâ au Cap Bojador et sur leur hinterland. Ce traité, qui remettait en cause la concession faite illégalement par le caïd Mohammed Beyrouk, autorisant l’homme d’affaire anglais Marckenzie à installer une station commerciale au Cap Juby et à détenir le monopole du commerce dans la région de l’Oued Noun, disposait dans son article premier «Après que le Maroc aura acheté le fond de commerce de la compagnie, aucune puissance ne pourra émettre des prétentions sur les territoires allant de l’Oued Draâ au Cap Bojador et à l’intérieur parce que ces territoires appartiennent au Maroc ». Concrétisant la volonté du Sultan, un Caïd marocain fut alors installé à Cap Juby à l’ancienne station de Mackenzie. Ce traité était le seul accord de la période coloniale qui fixait une consistance territoriale au Royaume du Maroc avec sa participation.
c) La correspondance diplomatique concernant l’application du traité de Tétouan de 1860 et le Protocole de Marrakech conclu en Juin 1900 relatif à la cession d’Ifni, montraient que l’Espagne avait reconnu la souveraineté marocaine allant jusqu’au Cap Bojador.
d) Enfin, les lettres annexes au traité Franco-Allemand du 4 Novembre 1911 affirmaient expressément: «Etant convenu que le Maroc comprend toute la partie Nord de l’Afrique qui s’étend entre l’Algérie, l’Afrique Occidentale Française et la Colonie Espagnole du Rio de Oro ». Ces lettres déterminent sans équivoque le contenu territorial de l’Etat Marocain et reconnaissaient que la frontière du Maroc allait jusqu’à Chenguit c’est-à-dire la Mauritanie.
Lors de l’examen de l’affaire du Sahara par le CIJ, le Maroc avait présenté des dizaines de textes et documents à caractère interne qui témoignent de l’exercice effectif, permanent, continu et paisible de la souveraineté par le Sultan sur les territoires sahariens.
Cette souveraineté était d’ailleurs reconnue par les principales puissances étrangères de l’époque. On peut, à titre d’illustration se référer aux accords maroco-espagnol de 1767, maroco-américains de 1786 et 1836, maroco-anglais de 1856 et 1895, franco-allemand de 1911, etc.
Ces fondements historiques et juridiques permettent de mieux appréhender les bases juridiques sur lesquelles repose le parachèvement de l’intégrité territoriale intervenue en 1975.
Les réactions soutenant le Maroc dans sa lutte pour le parachèvement de son intégrité territoriale:
En Algérie, l’association des Oulama sous la direction du Cheikh Mohammed kheïr Dine condamna l’attitude de Boumediene dans l’affaire du Sahara. Le premier président du GPRA, Ferhat Abbas dénonça le complot dans son ouvrage « l’Algérie, l’indépendance confisquée»:
«Le monde arabe qui doit faire face depuis 33 ans au tragique problème palestinien en connaît un autre, celui du Sahara occidental. Ce poignard planté dans le dos de la communauté maghrébine est la plus scandaleuse des aventures. C’est un crime perpétré contre l’unité et la paix nord-africaine»
«Quand Boumediene a attisé un incendie au Maghreb, qu’il a fait tuer des algériens pour une cause qui n’est pas la leur, qu’une partie des richesses se sont envolées en fumée dans les sables du Sahara, comment a-t-il pu parler de l’unité de la «nation arabe» alors qu’il n’a pas été capable d’oeuvrer pour faire l’unité du Maghreb»
Le premier président de la république Algérienne Ahmed Benbella: «Du point de vue Historique, le Sahara Occidental est le prolongement historique du Maroc. Toutes les dynasties marocaines ont eu des liens avec le Sahara
L’Algérie n’a aucun intérêt à faire éclater le Maroc. La solution du problème se trouve pour moi, dans la formation d’une sorte de fédération ou confédération nord-africaine, à laquelle peuvent adhérer l’Algérie et la Mauritanie. Une sorte de grand Maghreb » (l’Opinion —24janvier 1987)
En Espagne, Beaucoup de voix se sont élevées pour exprimer leur solidarité avec le peuple marocain pour la réalisation complète de son unité territoriale. Le parti communiste espagnole avait publié à l’époque sur les colonnes de la Nuestra Bandera en mars 1958, un communiqué dans lequel il déclarait: «La conséquence la plus grave de cette politique colonialiste, hypocrite, est la guerre d’Ifni et des territoires sahraouis. Les habitants de ces territoires ont plusieurs fois manifesté leur volonté de conquérir leur liberté et de réintégrer leur mère patrie ». L’écrivain Juan goytisolo (prix éxopalia) écrivait sur l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation: «Le dogme de l’intangibilité des frontières coloniales, appliqué à la lettre, aurait donc consacrer l’existence, sur le sol marocain, d’une demi-douzaine d’entités indépendantes : un Etat rifain dans la zone du nord de l’ancien protectorat espagnol, un autre dans la ville libre de Tanger, un troisième dans le protectorat français, un quatrième à Sidi Ifni, un cinquième à Tarfaya et un sixième dans le Sahara Occidental ».
On ne peut parler de l’affaire du Sahara sans se rappeler de cette réflexion du regretté Michel Jobert : «dans toute cette affaire planent deux logiques: ou bien les ressources sahariennes servent au développement des populations du Nord, nombreuses et peu favorisées. Alors le Maroc n’a pas tort. Ou bien l’unité de la zone saharienne, dans ses ressources et ses populations, est reconnue: il faut alors revoir toutes les frontières et accepter la création d’un Etat riche, peu peuplé, très étendu ».
Conclusion
Le problème du Sahara est en dernier ressort, un problème politique. Mais l’action politique qui se veut efficace, qu’elle se propose d’ailleurs de renforcer l’ordre établi ou d’en changer les bases, doit prendre absolument sur les données que l’histoire a crée. Si «problème politique » signifie que chacun choisi selon sa couleur ou sa doctrine politique, l’histoire devrait nous mettre en garde. L’affaire du Sahara dans son essence, n’a rien à voir avec la forme des institutions marocaines. C’est l’intérêt profond et durable de tout un peuple qu’elle met enjeu.
La marche verte qui fut une étape de l’histoire marocaine un moment de la conscience d’un Roi et d’un peuple, est pour l’historien la preuve qu’ils seront toujours là, prêts à jouer, le réflexe unitaire qui, pendant les siècles passés, a soudé pour la survie, le peuple marocain et son trône.