L’ex-OUA et le conflit du Sahara : Une manœuvre osée.

Premier président de la république de Guinée, Ahmed Sekou Touré, fut le seul dirigeant africain à avoir dit non au projet de l’union française proposée dans les années 50 du siècle dernier par le Général De Gaule. Lui et son peuple avaient assumé pleinement les conséquences. Homme de gauche, convaincu, juste, révolutionnaire, Ahmed Sekou Touré était l’un des premiers fondateurs de l’union africaine.
Intervenant devant le comité des sages créé Par l’OUA, et réuni à Freetown pour trouver une issue au problème du Sahara. Le défunt Ahmed Sekou Touré, dont le pays n’avait pas à l’époque des relations diplomatiques avec le Maroc, exprimait son point de vue en tant que sage africain sur cette affaire. Après avoir gardé le silence durant trois jours de débat devant le comité des sages, dans une ambiance de confusion et des tentatives de masquer la vérité, Ahmed Sekou Touré a fait la plaidoirie suivante :

« Ce différent est contraire aux principes sur la base desquels a été constituée l’OUA dont le Maroc est l’un des principaux fondateurs. Le Royaume avait soutenu la révolution algérienne pendant la guerre de libération, et s’est opposé farouchement contre le projet français de l’OCRS. Nous n’avons jamais entendu parler d’un sentiment national saharien, s’il avait existé on l’aurait soutenu. Pour nous, seul le Maroc revendiquait le Sahara. Nous l’avons appuyé dans sa longue lutte contre le colonialisme espagnol. Nous avons soutenu pendant une période Roberto, et l’avons reconnu comme représentant de l’Angola, mais lorsque le MPLA est apparu comme le légitime représentant de la révolution angolaise, nous avons été franc avec Roberto, la Guinée lui octroyé la nationalité. Le Maroc a soutenu le nationalisme Congolais et son symbole le martyre Lumumba, mais rien ne pouvait arrêter à l’époque l’infernale machine colonialiste et impérialiste qui a fini par assassiner Lumumba, allant même jusqu’à éliminer l’ex secrétaire général de l’ONU Dag Hamarjeold. Nous nous sommes opposés au séparatisme biafrais dans le but de préserver l’intégrité territoriale du Nigeria, et ce malgré le fait qu’on avait des amis biafrais. En quoi consistait le rôle du comité des sages ? Il s’agit d’un instrument de travail et non d’un organisme souverain désigné par le conseil des présidents, sa mission émane du sommet. L’OUA avait formulé, et en attendant les résultats des investigations du comité, une demande à l’ONU et aux non alignés pour éviter de prendre une position à cette affaire. J’ai été choisi comme membre du comité afin de trouver un compromis, et non aggraver le conflit. Beaucoup de bavures ont été commises, le comité a créé un sous-comité composé de présidents Traoré et Oubassangeo, ce sous comité a commis une grave erreur, son rapport devrait être soumis à l’ensemble des membres de comité, ce qui n’a pas été le cas. Je n’ai pas assister à la réunion du comité jusqu’au moment où nous nous sommes trouvé tous devant le fait accompli au 16ème sommet de l’OUA à Monrovia. L’OUA n’est pas un syndicat des présidents, ni un parti politique, elle est une organisation composée d’Etats qui devra prendre en considération le réalisme et l’unité. Le Maroc a saisi le président de l’OUA sur le cas des deux membres de comité des sages qui ont reconnu la RASD, le Mali et la Tanzanie et qui ne peuvent plus être juges et parties. Nous somme tenus d’appliquer l’article 27 de la charte, qui stipule que son interprétation exige la majorité des deux tiers. Le comité devrait répondre d’abord à la question postérieure sur le différent, car dans le cas contraire l’admission de la RASD, même par 49 voix sur 50, est une violation de la charte. Le secrétaire général de l’OUA n’avait aucun droit de formuler son propre avis sur cette affaire. Aujourd’hui que l’Etat sahraoui existe pour certains, et qu’il leur paraît une réalité, pourquoi alors avoir besoin d’un comité des sages ? Il ne faut pas perdre de vue que le Maroc avec son Sahara est un peuple et un Etat, et il ne faut pas que l’illégalité l’emporte sur la légalité. »
Mais malheureusement, l’OUA, habituée à louvoyer, il est très rare qu’elle prenne des résolutions aussi tranchées contre un Etat membre, elle s’est donc sciemment égarée depuis dans cette affaire, alors que la raison de sa création était l’unité africaine. La manœuvre est osée.