Débat à la Chambre des conseillers: Plaidoyer pour la protection des données personnelles des citoyens

Les participants à une table-ronde organisée, mardi à la Chambre des conseillers, ont unanimement insisté sur la nécessité d’une protection effective des données personnelles des citoyens, tout en préconisant une collecte légale des données pour drainer les investissements extérieurs qui tablent en grande partie sur la digitalisation. Lors de cette rencontre-débat organisée en partenariat avec la Commission nationale de contrôle de la protection des données à caractère personnel (CNDP), sur la loi no 09-08 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel, les intervenants ont souligné l’importance de disposer d’un cadre juridique comme cette loi pour être en phase avec l’évolution qui se produit au niveau international, surtout en Europe. Ils ont noté que la loi 09-08 vise principalement à doter le Maroc d’un instrument juridique qui encadre l’utilisation des données personnelles et réglemente la gestion de l’opération par les entreprises publiques et privées. C’est d’ailleurs l’avis du président de la Chambre des conseillers, Naama Mayara qui a affirmé que la question de la protection des données personnelles revêt une importance cruciale, non seulement au Maroc mais aussi sur le plan international, estimant que cette protection est en faveur de la promotion des libertés et des droits fondamentaux des individus en cela qu’elle leur offre des garanties juridiques et constitutionnelles et les met à l’abri de toute intrusion dans leur vie privée. Il a ajouté que la protection des données à caractère personnel représente l’un des fondamentaux de la protection de la vie privée et un des boucliers favorisant la confiance dans l’univers numérique ainsi que l’utilisation sécurisée des technologies de l’information et de la communication, surtout dans le domaine de l’économie et du développement. Tout en soulignant que le Maroc, à l’instar des autres pays démocratiques, accorde une importance particulière à la protection des données personnelles, M. Mayara a fait savoir que le Royaume a prouvé depuis l’entame de ce millénaire son attachement et sa constante détermination en faveur de la défense des droits de l’Homme et ce, à travers de nombreuses réformes juridiques et constitutionnelles. Il a indiqué, à ce propos, que le Maroc dispose aujourd’hui d’un important cadre juridique et institutionnel en citant d’abord à l’appui l’article 24 de la constitution qui porte sur le droit à la protection de la vie privée, et aussi la loi no 09-08 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel qui a donné naissance à la CNDP, seule et unique autorité chargée de la supervision et du contrôle. Et de conclure en préconisant de s’inspirer des bonnes pratiques continentales et régionales concernant ce domaine pour pouvoir, d’une part, déterminer le degré de similitude entre les lois nationales relatives à la protection des données personnelles et aussi, d’autre part, évaluer leur compatibilité avec les législations internationales ainsi que les recommandations convenues et adoptées au niveau international. Pour sa part, le président de la CNDP, Omar Seghrouchni a tenu à préciser que l’article 27 de la loi no 09-08 offre au gouvernement et au parlement la possibilité de demander un avis de la CNDP au sujet de tous les projets de loi concernant les données personnelles, un concept qu’il convient, à ses yeux, de ne pas appréhender en suivant seulement une approche juridique stricto sensu mais en faisant appel à une démarche associant les volets juridique, organisationnel et aussi les aspects techniques. Il a relevé que cette démarche a donné naissance à un nouveau métier portant spécifiquement sur la protection des données à caractère personnel, surtout avec les évolutions rapides enregistrées dans le domaine numérique et le développement de nouveaux supports tels les réseaux sociaux et les plateformes internationales. Il a aussi noté que le principe de base demeure avant tout la protection du citoyen à une époque de numérisation galopante et ensuite, l’instauration d’une confiance numérique pour attirer les investissements, indiquant que la relation entre le responsable du traitement des données et la personne concernée s’appuie sur le respect de la loi auquel veille la CNDP. Après avoir expliqué que la protection des données personnelles se construit et se conforte en permanence au niveau international et que le traitement des données se fait sur la base de la collecte, l’utilisation et la suppression des traces, il a fait savoir que les lois autorisent la collecte alors que la loi 09-08 s’applique sur l’utilisation et la suppression des données stockées. Tout en estimant que l’un des principaux défis aujourd’hui et dans le futur ne porte pas sur la nature de l’information mais surtout sur les données comportementales, un aspect qui a, selon lui, des effets sur les plans économique et politique, il a plaidé pour un respect strict de la loi dans le traitement des données à l’appui d’une démarche basée sur un traitement intelligent et une approche intégrée associant les nécessités de l’économie et la protection des données à caractère personnel et ce, pour instaurer la confiance entre les citoyens de manière à favoriser leur intégration de façon normale dans l’univers digital. De son côté, Driss Belmahi, membre de la CNDP, a souligné que les données personnelles sont un élément fondamental dans le domaine de l’investissement, notant, néanmoins, que la non-violation de la vie privée et la protection des données personnelles s’imposent comme un défi dans l’activité économique. D’où, pour lui, l’importance de relever ce challenge en préservant à la fois les intérêts économiques et la confiance des collaborateurs et des clients ainsi que le respect de l’État de droit. Car, poursuit-il, le soutien et la promotion de l’économie numérique sont une nécessité incontournable, exigeant au préalable l’instauration de la confiance entre les opérateurs économiques à l’appui d’une concurrence loyale. Et de plaider en faveur du respect des règles de la transparence dans l’utilisation des données personnelles des clients à travers leur traitement en toute honnêteté, et ce, conformément aux principes de l’État de droit qui exigent une gestion des données dans le respect des fondamentaux de la gouvernance et des garde-fous constitutionnels. La CNDP a été créée par la loi no 09-08 du 18 février 2009 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel. Elle est chargée de vérifier que les traitements des données personnelles sont licites, légaux et qu’ils ne portent pas atteinte à la vie privée, aux libertés et droits fondamentaux de l’homme. La Commission est formée de personnalités notoirement connues pour leur impartialité, leur probité morale et leur compétence dans les domaines juridique, judiciaire et informatique. Le président de la Commission est nommé par SM le Roi Mohammed VI. Six membres sont nommés également par le Souverain suite à une proposition du chef de gouvernement (deux membres), du président de la Chambre des représentants (deux membres) et du président de la Chambre des Conseillers (deux membres). Les membres de la Commission sont désignés pour une période de 5 ans, renouvelable une seule fois.